L’histoire de la Nike AIR FORCE 1

Cette année, nous célébrons le 40ème anniversaire d’une des paires de sneakers les plus populaires. On parle ici de l’un des modèles les plus vendus de l’histoire, l’une des paires les plus portées au monde, notamment dans son coloris emblématique, en version basse, totalement blanche.

Vous avez sans doute déjà compris, cette année, la Air Force 1 de chez Nike fête ses 40 ans d’existence.

Je vous propose pour l’occasion de revenir sur l’histoire et l’évolution de la paire de baskets la plus portée dans le monde.

Une naissance compliquée

La Air Force 1, comme nombre de ses consœurs, ne s’est pas imposée immédiatement lors de sa création, mais doit son salut à deux villes des Etats-Unis, Philadelphie, et Baltimore.

Revenons sur la genèse de la paire de sneakers la plus populaire de chez Nike.

Nous sommes alors au tout début des années, et un jeune designer du nom de Bruce Kilgore travaille sur un modèle dédié au basket ball.

Nike est alors très en retard sur ce marché, avec sa vieillissante Blazer, et cherche à concurrencer l’hégémonie de la Converse All-Star, qui domine le marché des paires destinées à la pratique du Basket-ball.

Et l’idée de base de la Air Force 1 viendra du succès de la Air Tailwind, la première paire de running dotée de la technologie Air, que Nike a lancé en 1978 au marathon d’Honolulu. Cette technologie Air, donc, inspirée des capsules de gaz des combinaisons des cosmonautes, c’est ce qui va révolutionner le marché des sneakers à l’époque, et donc donner naissance à la Air Force 1.

Bruce Kilgore va alors mélanger cette technologie avant-gardiste au design d’un modèle destiné à la randonnée de la marque au swoosh, la Nike Approach. En retravaillant le tout, et en imaginant la structure de sa basket en se basant sur l’architecture de la cathédrale Notre Dame de Paris, Bruce Kilgore crée, en 1982, ce qui deviendra un succès inattendu, la Nike Air Force 1.

La Nike APPROACH

Destinée à la pratique du basket-ball, et rien d’autre au moment de sa création, la paire n’existe qu’en version haute. Et pour son lancement, Nike équipe 6 joueurs de la NBA de la paire, à grands renforts de publicité, pour la première fois de l’histoire de la marque.

Michael Cooper, Jamaal Wilkes, Bobby Jones, Mychal Thompson, Calvin Natt et Moses Malone se retrouvent à faire la promotion du nouveau modèle. Et c’est Moses Malone qui va permettre à la paire de débuter sa légende, notamment à Philadelphie, ou il joue pour les 76ers, la franchise NBA de la ville.

En 1983, Moses Malone, joueur star de son équipe, permet aux 76ers de remporter le titre NBA, un titre attendu dans la ville depuis plus de 15 ans. Cette victoire attache durablement l’histoire des Air Force 1 à celle de la ville, et à tous les pratiquants du sport dans la ville.

La paire séduit rapidement les joueurs de basket. Par son histoire, mais aussi par son design, et ses spécificités techniques. La paire possède pour l’époque l’un des meilleurs amortis possible grâce à son coussin d’air au talon, et une adhérence hors norme, portée par des points de pivots circulaires placés sous la semelle, points de pivots qui sont encore aujourd’hui visibles si vous regardez le dessous de votre paire de Air Force.

Mais voilà, malgré le succès apparent de la paire, Nike est à l’époque dans une stratégie simple : chaque produit doit être renouvelé tous les deux ou trois ans. En 1984, donc, la marque cesse la production de la Air Force 1, et l’histoire de ce modèle aurait bien pu s’arrêter là.

Mais c’est à quelques kilomètres à l’Ouest de Philadelphie, dans la ville de Baltimore, que la légende va continuer. La jeunesse de Baltimore continue de réclamer des Air Force 1, et 3 revendeurs de la ville, surnommés depuis les « Three Amigos », demandent alors à Nike de ressortir le modèle.

Cinderella Shoes, downtown locker room et Charlie Rudo Sports, voici donc les trois héros qui ont contribué à sauver la Air Force 1, et on les en remercie encore aujourd’hui !

Nike oblige alors les 3 revendeurs à prendre en stock 1200 paires de chaque coloris produit, une quantité énorme pour l’époque, et donc un pari commercial très risqué pour les gérants de ces boutiques.

Les coloris produits sont la blanche/bleu royal, la blanche/marron chocolat. Et à la surprise générale de Nike, les quantités sont complètement sold-out en un rien de temps.

Les revendeurs de Baltimore s’associent alors avec Nike pour créer le programme « Shoe of the month ». Chaque mois, un nouveau coloris de la Air Force 1 était mis en vente, et uniquement durant ce mois. 12 couleurs, donc, qui se sont toutes vendues en intégralité, confirmant l’appétence pour ce modèle, en passe de connaitre sa première résurrection. Les clients venaient de New-York ou de Washington, faisant plus de 2 heures de voiture pour dénicher leur paire fétiche.

Aucune publicité, aucune promotion, juste du bouche à oreille et l’intuition des Three Amigos, voilà ce qui a amené la renaissance de la Air Force 1.

Les Air Force 1 vont alors commencer peu à peu à sortir des terrains de baskets, le lieu pour lequel elles ont été créées à la base. Jusqu’en 1991, le programme Shoe of the month perdurera, avant un retour plus global du modèle. Mais attention, nous restons là à l’échelle Américaine. Pour voir arriver le modèle en Europe, il aura fallu patienter jusque 1995, et une commercialisation qui commencera par le Royaume-Uni avant de s’étendre partout dans le monde.

Nike relance la Air Force à travers le globe, allant à l’encontre des stratégies de la marque à l’époque, et le modèle verra son succès continuer jusqu’au début des années 2000, une longévité incroyable pour une paire de sneakers prévue au départ pour n’exister que deux ans.

Entre temps, le modèle s’est décliné, avec une version basse, apparue furtivement en 1983, mais bien popularisée après la ressortie du modèle. En 1994, c’est la version Mid qui est créée, à mi-chemin entre la basse et la haute, elle permet un confort plus souple, plus adapté aux besoins du quotidien. Mais ce qui va faire basculer encore une fois le destin de la Air Force 1 va se dérouler au début des années 2000.

La Air FORCE 1 Intègre la pop-culture

Au début du millénaire, le Hip-Hop explose sur la scène internationale, et de très nombreux artistes vénèrent la Air Force 1. Nike produit des modèles dédiés à des artistes, ou à des labels comme Roc-A-Fella, et sont portées par Jay-Z, 50 Cent ou Nelly, qui leur dédiera un titre. Titre qui sera par la suite banni des télévisions et radios Américaines, car jugé trop proche d’une publicité, c’est dire l’amour des artistes Américains pour le modèle.

Il existe aussi une légende autour de Dr Dre, qui ne porterait chaque paire de Air Force qu’une seule fois pour être sur qu’elle conserve sa couleur blanche immaculée. Une légende qui reste à vérifier.

Et pour accentuer encore l’impact du modèle, en 2001, Nike produit enfin le modèle dans des pointures dédiées à la gent féminine.

Alors que jusque-là les Air Force 1 n’existaient qu’à partir de la pointure 39, le modèle descend dorénavant jusqu’au 35, de quoi toucher et conquérir un public encore plus large.

Coté sportif, si Rasheed Wallace continue à porter le modèle en NBA jusqu’à l’issue de la saison 2012-2013, le modèle a été dépassé par des paires plus légères, plus souples, et plus performantes. La Air Force 1 est devenu un vrai modèle lifestyle, et Nike le sait bien. Les couleurs, les matières et les formes s’enchainent, tout comme les collaborations avec les plus grandes marques. Louis Vuitton, Supreme, Playstation, Colette, Off-White, toutes se sont essayer à produire leur modèle de Air Force 1, et on passera le cas de Bape, ou la Bapesta est une copie presque conforme du modèle au swoosh.

En 2012, pour les 30 ans de la Air Force 1, Thibaut de Longeville, réalisateur et entrepreneur Français, réalise un documentaire d’une vingtaine de minutes sur l’histoire du modèle, faisant passer devant sa caméra les Three Amigos, ou encore le DJ Clark Kent, dont l’histoire raconte qu’il possède plus de 6000 paires de Air Force, le documentaire expliquant comment le modèle s’est imposé à Philadelphie, puis Baltimore, avant de devenir une référence notamment à Harlem.

En 2017, pour célébrer les 35 ans du modèle, c’est Virgil Abloh qui réalisera une collection, « The Ten », ou le créateur revisite le modèle en y ajoutant des accessoires et en retravaillant le swoosh massif latéral, marque de fabrique de cette paire.

En 2022, nous arrivons donc aux 40 ans du modèle, mais les retards de production liés au covid laissent à craindre qu’on ne puisse profiter pleinement de ce que Nike nous avait préparé.

Quelques histoires autour de la légende de la Air Force

Pour terminer, voici quelques histoires autour du mythe de la Air Force. Si vous en avez une paire, ou plusieurs, vous avez surement remarqué ce petit morceau métallique sur le bas de vos lacets. Cet ustensile, purement décoratif, est appelé un « Deubré ». Il est apparu sur la paire en 1994, imaginé par le designer Damon Clegg, et son nom s’inspire du mot « doobrie », que l’on pourrait traduire par « truc » dans le dialecte de Glasgow parlé par le designer. A noter que ce Deubré n’est pas présent sur les modèles pour enfant, puisqu’il a été considéré comme dangereux et susceptible d’être avalé par les plus jeunes.

D’après les rares chiffres donnés par Nike, depuis 1982, entre les versions hautes, mid, low, les dérivées comme les Fontanka, ou les Shadow, il existe plus de 2000 versions de la Air Force 1, sans compter toutes celles qu’il est possible de créer via le programme Nike Id. En 40 ans d’existence, ça représente environ 50 coloris par an. Rien que ça.

Un chiffre incroyable pour finir, selon les estimations, Nike vend en moyenne pour 800 millions de dollars de Air Force 1 chaque année. En supposant que ce chiffre reste constant, après 40 ans d’existence, la paire aura donc généré 32 milliards de revenus pour Nike.

Pas mal pour un modèle qui ne devait exister que deux ans.

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