Aujourd’hui je vais vous raconter l’histoire de la plus discrète des légendes de la sneakers.
Jamais vraiment hype, jamais totalement tendance, mais toujours là au fils des années, portée par des dizaines de milliers de personnes dans le monde entier depuis plus de 50 ans. Pourtant, si l’on en suit la logique, les Gazelle d’adidas, car c’est d’elles dont il s’agit, n’existent pas vraiment.

Les gazelle, des sneakers au nom à l’origine trouble
Si la gazelle a, au fil des années était portée par des stars comme le groupe Oasis, Kate Moss ou Michael Jackson, cette paire d’adidas n’a jamais été la plus mise en avant, toujours devancée par ses consoeurs, les Stan Smith et le Superstar.
Pour autant, l’histoire des Gazelle n’est pas moins intéressante. Pour comprendre ce modèle et son histoire, il faut faire un grand bond en arrière et retourner dans les années 1960.
On revient alors en 1960, aux Jeux Olympiques de Rome. La sprinteuse Américaine Wilma Rudolph gagne alors trois médailles d’or, équipée de pointes créées par adidas.
Atteinte de Polio, elle n’a pu commencer à marcher qu’à l’âge de 12 ans. Pour autant, à Rome, elle remportera l’or au 100 mètres, 200 mètres, et 4×100 mètres. Surnommée la Gazelle noire, elle sera alors la femme la plus rapide du monde à cette époque.

Si adidas n’a jamais communiqué sur l’origine du nom du modèle sorti en 1964, c’est l’une des explications possibles, souvent avancées par les connaisseurs.
L’autre explication vient de la concurrence de l’époque sur le marché de la basket. Fondé par Adi Dassler, adidas a alors un énorme concurrent, mené par Rudolph, Dassler, l’autre frère, qui a lui fondé Puma.

Ce serait pour pousser encore plus loin la concurrence que Adi Dassler aurait appelé cette paire la Gazelle, adidas ayant alors une habitude à donner à ses baskets les noms des mammifères terrestres le plus rapides, ce qui donnera notamment naissance aux adidas Panthère, et aux adidas Jaguar, deux modèles qui ne sont pas, eux, restés dans l’histoire.
Mais ce qui rend la Gazelle si différente, ce n’est pas son nom. Non, la spécificité de la gazelle, c’est qu’en fait, elle n’existe pas vraiment.
Une sneakers qui n’existe pas
A sa sortie, c’est alors la première paire d’adidas fabriquée à partir de cuir suédé, exactement comme sa plus grande rivale, la Puma Suède. L’idée de ce cuir suédé est d’offrir une basket bien plus légère, mais qui protège toujours autant le pied des chocs. Mais dès sa sortie, la Gazelle est en fait le nom donné à deux modèles pourtant bien différents.
La Gazelle Blau, qui, comme son nom l’indique, est faite de cuir suédé bleu, avec ses trois bandes blanches caractéristiques. Sa semelle est divisée en cellules de technologie microcell, qui ajoute de toutes petites bulles d’air dans le caoutchouc, afin d’amortir encore plus la foulée. Cette première paire, qui porte le numéro 310 dans le catalogue adidas de l’époque, est conçue spécialement pour le sport en salle.
Juste à coté dans le catalogue, avec le numéro 311, est proposée la gazelle Rot. Son nom indique sa couleur rouge, mais ce n’est pas la seule différence entre les deux paires, qui portent pourtant le même nom. La gazelle Rot a une semelle extérieure avec un motif de vague, pour améliorer la traction et éviter les glissades. L’objectif lors de sa conception était de la rendre parfaite pour le sport en extérieur, notamment la course à pied.
On est alors sur une première dans l’histoire de la sneakers. Un modèle, avec le même nom, mais deux variations au final très différentes. Et c’est aussi cela qui explique l’histoire non linéaire de la Gazelle.

Dès les années 1970, les Gazelle deviennent l’un des modèles les plus populaires chez adidas, mais chez les sportifs en général. Pour preuve, c’est un nageur, Mark Spitz, qui aux Jeaux olympiques de Munich de 1972 mettra la paire sous les projecteurs, tenant ses gazelle bleu à la main lors de la remise de l’une des 7 médailles d’or qu’il remportera cette année là.
Et pour compliquer encore l’héritage du modèle, la marque aux trois bandes continue de le modifier, de le retravailler, de le réimaginer.
Si sa forme change au final assez peu, bien que la talonnette renforcée pour augmenter le confort n’apparaitra qu’en 1972, la gazelle finit par adopter une semelle exterieur à la forme de ruche d’abeille, un motif que l’on retrouve encore aujourd’hui sur le modèle, 50 ans après.
Une autre des spécificités de la gazelle, et c’est aussi ce qui explique qu’elle n’a jamais été considérée comme un produit rare ou un graal chez les sneakerheads, c’est qu’adidas, pourtant habitué à arrêter tous ses modèles au bout de 4 ans d’existence à l’époque, continue de la produire.
En 1971, une nouvelle version de la Gazelle, une de plus, voit le jour. Cette année là, adidas lance un nouveau concept, ou de nombreuses anciennes gloires de la marque sont retravaillées, réimaginées, afin de les rendre mieux adapté à l’évolution des athlètes et de leurs besoins. Avec une nouvelle forme et une nouvelle semelle transparente, la gazelle réimaginée est alors pensée comme une paire destinée à la pratique du handball. Plus tard, elle sera rééditée sous le nom de Gazelle Indoor, et sortira de la gamme gazelle classique.

Dans les années 1980, la gazelle est alors un incontournable, et la paire sort des installations sportives et gagne les rues et le quotidien.
C’est au royaume uni qu’elle est la plus populaire, adidas proposant alors des coloris uniquement dédiés à ce marché, des coloris qui ne seront proposés dans le reste de l’Europe que 10 ans plus tard.
Pour la jeunesse britannique, la Gazelle est la paire fétiche. Le modèle, facile à accorder, et toujours bon marché, est porté par toute une génération. Les supporters Anglais des différents club de football font aussi de la gazelle leur absolu. Elle est aux pieds de très nombreux visiteurs des stades Londoniens et Mancuniens, mais aussi à ceux de certains joueurs en avant match.

Très adaptée aux différents marchés, la Gazelle a connu des formes différentes tout au long de sa longue histoire. Ainsi, à New-York ou à Paris, à Londres ou à Munich, les Gazelle n’ont pas été proposées par adidas avec les mêmes formes, les mêmes couleurs, ni même les même technologies.
Portée par Oasis, par Blur, et par d’autres groupes de rock Anglais, la Gazelle prend dans les années 90 un virage très british, même si la paire avait déjà été vue près de 20 ans auparavant aux pieds de Mick Jagger et Keith Richards. Kate Moss deviendra l’une des plus grandes figures de la paire, finissant par prêter son image à la campagne autour du retour des Gazelle en 2016.
Ce modèle de 2016 est maintenant commun au monde. Si il existe évidemment en de très nombreuses couleurs, sa forme, sa semelle et sa technologie est maintenant fixée, et ou que vous alliez dans le monde, la Gazelle sera la même.
Il n’y a plus des Gazelle, mais la Gazelle, unique, finalement inspirée par l’héritage des dizaines d’itérations qui auront fait de la paire une légende de la sneakers. Toujours boudée par les collectionneurs, elle fait le bonheur de très nombreuses personnes qui cherchent à sortir des classiques baskets blanches en apportant un peu de couleur à leur tenue. Disponible depuis plus de 50 ans, la Gazelle est une vraie basket populaire, vrai symbole de l’histoire d’adidas.
Vous pouvez retrouver l’histoire des Gazelle dans le podcast Sneakers Culture :
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